Lausanne à Table I Événements gourmands de mai à décembre

Lausanne à Table propose plus de 30 événements gourmands, festifs et décalés de mai à décembre !

Critiques gastronomiques, qui vous a fait rois ?

A quoi servent les critiques gastronomiques ? Le journaliste gastronomique de 24Heures et le responsable de Gault&Millau en Suisse Romande partagent leurs réflexions. Deux épicuriens passionnés de cuisine, experts, auteurs et collectionneurs de livres de cuisine. Entretien croisé avec David Moginier et Knut Schwander.

J’ai trop de respect pour le travail des cuisiniers, même mauvais, pour aller les démolir. Je préfère le rôle de découvreur.

David Moginier, journaliste gastronomique a 24heures

Comment voyez-vous le rôle d’un critique gastronomique aujourd’hui ?

Knut Schwander : Il est plus important que jamais, dans la jungle des pseudo cotations et échanges d’avis qui pullulent ! Pour autant que sa démarche reste journalistique, c’est-à-dire indépendante et au service des ses lecteurs.

David Moginier : A l’heure où tout le monde est critique sur TripAdvisor, le rôle du critique est de susciter l’enthousiasme. J’ai trop de respect pour le travail des cuisiniers, même mauvais, pour aller les démolir. Je préfère le rôle de découvreur. Au Coup de fourchette, nous ne parlons que des restaurants que nous pourrions «conseiller à un ami». Si nous sommes déçus, nous n’écrivons rien. Cela ne sert à rien de pointer le doigt sur des mauvais.

Un critique gastronomique est-il utile plutôt au public ou aux restaurants ?

DM : Aux deux, mon général ! Au public pour découvrir de nouvelles adresses (ce que nous faisons principalement dans le Coup de fourchette, on ne revient pas les années suivantes en général). Et aux restaurateurs que nous mettons en lumière.

KS : S’il n’était pas utile au public, il n’aurait pas de raison d’être. Mais au même titre qu’un critique de cinéma ou littéraire, il permet de trier un type d’offre en fonction de critères explicites. Il est l’ami de son public, en quelque sorte. Il ne peut du coup pas être l’ami des restaurateurs, puisqu’il juge leur travail. Ce qui ne veut pas dire qu’il ne leur soit pas utile ou qu’il se profile en ennemi! Un guide ou un article, même s’ils ne sont pas uniquement élogieux, offrent une visibilité aux restaurants. Un regard sans complaisance, mais aussi sans désir de nuire.

Un guide ou un article, même s’ils ne sont pas uniquement élogieux, offrent une visibilité aux restaurants. Un regard sans complaisance, mais aussi sans désir de nuire.

Knut schwander, responsable Gault&millau suisse romande

A quoi et à qui servent encore aujourd’hui les guides gastronomiques traditionnels ?

DM : Cela dépend des guides. Il y a les «bibles», Michelin ou Gault&Millau, que les chefs prennent comme un classement sportif et qui sont censés suivre leurs progrès ou aléas. Cependant, ils ne traitent qu’un certain type de cuisine gastronomique. Et les gens recherchent aussi aujourd’hui la meilleure pizzeria ou la meilleure fondue, ou des attrape-nigauds du genre les 10 meilleures terrasses de Genève. Les guides tentent de suivre le marché sur internet ou sur mobile, avec plus ou moins de succès.

KS : Le guide reste un objet intime, un partenaire, un ami. Surtout en version papier, c’est un cadeau idéal pour tous ceux à qui on ne sait pas quoi offrir : utile, pas cher et …périssable (ce qui permet d’en racheter un l’année suivante!). Mais le rythme annuel ne correspond plus à toutes les attentes d’un public habitué aux informations immédiates et courtisé par des sites aux intentions souvent diffuses, mais en continuel mouvement. C’est pourquoi le Gault&Millau a lancé son site, le Gault&Millau Channel il y a trois ans, avec un succès qui dépasse nos espérances et que le confinement a encore dopé. La preuve que l’information désintéressée et indépendante a de l’avenir.

Quel est votre rapport aux livres de cuisine?


KS : Je collectionne les livres, anciens et modernes, les menus aussi et même les objets liés à la table. Et bien sûr je les utilise! Sans vouloir regarder l’avenir dans un rétroviseur, c’est un ancrage dans l’histoire qui permet de mieux comprendre l’évolution de la cuisine. Et ça permet de servir de base pour faire des essais, pour explorer.

DM : Je collectionne surtout des livres de chef ou des livres sur des sujets précis. Le reste se trouve sur Internet. Et oui, ceux que je garde, je les utilise de temps en temps!

Votre Bible en la matière ?

DM : Un vieil attachement à La Cuisine spontanée de Freddy Girardet, un respect pour l’ancêtre Ali-Bab.


KS : La Cuisine spontanée de Freddy Girardet également, et les recettes de Gérard Rabaey. Mais il y a aussi les livres de William Ledeuil, de Michel Roth, par exemple… et beaucoup d’autres !

Cet entretien croisé prend place dans la programmation “Octobre du livre gourmand” . L’occasion d’un débat : Critique gastronomique, qui t’a fait roi ? Avec David Moginier, Knut Schwander et Albert Mudry, auteur du livre Joseph Favre, cuisinier et érudit (éd. Favre).

Débat ouvert au public, entrée libre et sur inscription
Samedi 24 octobre à 11h au Lausanne Palace
Entrée libre sur inscription à unlimited@lausanne-palace.ch